Comme tout le monde le sait nous sommes repartis dans les Pyrénées cet été. Pour conserver le souvenir de cette mémorable virée je vais vous livrer un CR de notre voyage. A vrai dire j'aurais bien avoué "tenter" d'aller au bout mais parait-il qu'il faut faire ou ne pas faire, essayer serait prohibé

Ainsi soit-il.
Entre nous 4, le titre c'est Tuono Cup 2018. Ça vaut ce que ça vaut mais ça nous fait rire et puis ça résume bien la situation.
Sinon j'avais pensé à:
#Encore plus de Pyrénées
#Les Pyrénéens #Les boules de pétanques offrez les dans les couilles !
#Viva Cataluna ! #No habla espanol en Cataluna…
#Dans la peau de John Malko-Biké.
#4 garçons plein d'avenir avec Biké dans le rôle de Patrick Sébastien.
Et y'en aurait plein d'autres.
#On s'en bat les couilles.
Au final c'est celui là que je retiendrai.

Vendredi 10 aout 2018, 11h30, Lachassagne
(#juste après Anse et la montée avec les deux épingles en enfilade droite-gauche y'a un raccourci pour l'éviter mais je le prends jamais).
Le triangle rouge s'éclaire sur le tableau de bord accompagné de son acolyte SERVICE sur l'écran à cristaux liquide. Je les déteste ces deux là !
Mais je connais la blague.
Si les meilleures sont les plus courtes, après trois coupures de contact et autant de redémarrages du moteur, les deux compères me font toujours la nique. Sans succès je réitère l'opération deux fois de plus pour être sûr.
« Qu'ai-je fais de mal ou mal fait ? » Pour l'instant je cause calmement à ma brêle même si on a tout juste parcouru 30 bornes et pas encore atteint le point de départ…ça chauffe un peu.
« Tu as été révisée il y a moins de 1000 bornes, ton train de pneus est neuf, ce voyage tu l'attends tout autant que moi, et fait inhabituel, et, grande courtoise de ma part, je t'ai lavée pour l'occasion. Alors qu’est-ce que tu me casses les couilles ? » Rapidement le ton monte.
Résigné je passe un coup de fil à Jean pour l'informer de mes déboires.
- « Peut-être je vais rentrer chez moi pour prendre le V2, lui changer les pneus dans l'après midi et vous rejoindre demain.
- Viens. On va voir ce qu’on peut faire. »
Soit.
Les 15-20 minutes suivantes vont sonner l'apparition des premières voix.
Ce pictogramme rouge est-il un signal ou un signe ?
La machine essaie-t-elle de communiquer avec moi par le biais de son seul système de communication archaique et limité (DARYL c'était le futur dans les années 80)? Simple ampoule grillée ou fusion du moteur c’est le même avertissement. Il n'y a pas de priorisation de l'information et c'est bien regrettable. Alors j’imagine des trucs. Une voix de fantôme surgie des profondeurs d’outre tombe : « Ne pars pas… ne pars pas… » Le ton enseveli sous 20 clopes grillées.
Je gagne néanmoins Fleurieu. Et je suis le premier !
Y'en a un il bosse encore ou tout juste et l'autre il a pas pris le bon train ou tout comme.
A peine arrivé, Jean sort sa caisse à outils de secours et très vite ma moto se retrouve éparpillée au pied de l'escalier menant à la terrasse où poussent les fleurs du mal. Une larme scintille du coin de mon œil droit, le verdict tombe rapidement.
- « C'est le moteur de valve d’échappement qui est cassé. Une panne courante. »
Moi je croyais que le zizzz zizzz à l’initialisation c’était le bruit de la pompe à essence…mais j’y connais rien en mécanique. J’avoue qu'un petit « contacteur de béquille HS » m'aurait bien satisfait.
- « Maintenant que l'on connaît la cause il n'y a plus à s'inquiéter.
- Pardi ! Mais va falloir me virer le voyant rouge du tableau de bord. Sinon ça ne va pas être possible ! »
En plus je suis exigeant.
Entre temps nos deux compères seront arrivés, j'aurai téléphoné à toutes les concessions Aprilia sur notre trajet en quête de la pièce défectueuse en vain, appris le montant de la dite pièce avec regret et par la même fait le deuil d'un remplacement dans un futur immédiat.
Egalement j'aurai appelé Dafy pour un éventuel changement de pneus pour le V2 dans l'après midi même, mais l'opération semblera impossible. Ainsi pas de regret ou d'hésitation.
Je note qu'aucun de mes compagnons de voyage n'aura eu l'outrecuidance de formuler la moindre remarque quant à la fiabilité de ma moto ; le même sort pouvant s'abattre à tout moment sur l'un ou l'autre des trois Tuono restants.
- « Regarde mon œuvre ! » Comme Jean semble m'y inviter.
Je note qu'il n'y a plus une vis parterre, déjà c'est beau. Et celle là sur l'établi? J'exagère…
Un morceau de scotch noir recouvre le récalcitrant voyant rouge désormais invisible.
- « Merci Jean ! »
C'est tout ce qu'il me fallait.
Le départ.

On a déjà perdu un litre de flotte corporelle avant même de partir.
Jean se charge de nous ouvrir la route pour regagner le Pilat. A brûle pour point je n'ai pas la tête à la navigation, mes pensées tournent en rond : « si tu ne reviens pas sache que je t’aurai prévenu ». Ce n'est pas bon de se laisser envahir par la pensée à moto. Tu te déconcentres, tu ralentis, le drame est si vite arrivé !
Soudain le GPS de Jean nous invite à nous pencher sur l'étymologie du terme « carrossable » et plus particulièrement sur son association contextuellement usitée de « route carrossable ». Déjà bien occupé par mon introspection sur l'origine de mes croyances et superstitions dans la pratique de la moto autant vous dire que la somme des sujets de fond à aborder dans un laps de temps si court me paraissait bien ardue.
La solution : on s'en bat les couilles !
Alors gaz sur le chemin de 1,5m de large avec l'herbe qui pousse au milieu, les marches de 30 cm en sous-bois, le gravier, la terre éparpillée ça et là, et j’en passe.
D'un coup ça va mieux, le cerveau est débranché, juste connecté sur une seule tache, réception et interprétation de l'environnement instantané pour réaction adéquate immédiate.
Ensuite Jean me parachute en zone méconnue, genre vas-y démerde toi, trouve la route.
A l'instar des cafouillages de son gps je dois opérer un reboot de mon système de navigation interne, c'est à dire retrouver un check point connu pour pouvoir lancer la boucle. Bref je suis un peu perdu.
Peut-être ai-je effectué une manœuvre un peu large pour gagner la piste de décollage, suivi d’un court demi tour, ceci-dit une nouvelle voix s'invite dans mon casque à peine étouffée par le barouf du moteur, le casque et les bouchons d’oreille, et pas même la distance de trois motos. Cette voix ne provient pas ma tête, j'en suis sûr. Et elle me fait sourire d’emblée. # Dans la peau de John Malko-Biké !
Parce que désormais j'ai un point de repère, dans 10 minutes les choses sérieuses vont commencer.
Rive de Gier - Bourg Argental – Tence – St Agrève – Le Cheylard – Mezilhac.
Un tracé idéal pour du rodage de pneus et une thérapeutique remise en conditions.
L'hôtel des Cévennes est ainsi rallié en fin d’après midi.
Apéro !
Seb commande un rhum. A la fin de cette semaine il sera devenu alcoolique et drogué mais ça il ne le sait pas encore.
Le diner et les digestifs avalés il est déjà temps d’aller se coucher.
Au moment précis de se séparer pour regagner chacun sa chambre une révélation terrible me glace les os, un oubli impardonnable me revient subitement en mémoire, le plancher tremble sous mes pieds, la foudre et le tonnerre éventrent la bâtisse: j’ai oublié ma flasque de whisky !
Comment pourrons-nous accomplir notre pèlerinage sans notre boisson liturgique? Quel tragique destin nous attend? Biké reviendra-t-il sain et sauf ?